La Pieuvre du Midi

Faits divers. Cela ne fait pas bon genre au moment-même où le club serait en passe d’être vendu.

Faits divers. Cela ne fait pas bon genre au moment-même où le club serait en passe d'être vendu.

Tout devait aller bien dans le meilleur des mondes… Après une saison 2023-24 pour le moins réussie (demi-finale des Play-Offs) par rapports aux objectifs initiaux (simple maintien), l’exercice 2024-25 s’annonçait sous les meilleurs auspices. Las. L’équipe bat de l’aile depuis le début de la saison, alternant bons et mauvais résultats, étant chroniquement irrégulière (voir p.14 du présent journal). Malgré tout, il y avait enfin un repreneur qui pointait le bout de son nez, en la personne d’Eddie Jordan. Bon, même si cela fait un moment qu’on n’a plus de nouvelle, il semblerait qu’on arrive à l’épilogue de cette histoire. Sauf que, dans l’intervalle, pas un, pas deux mais trois faits divers ont fait leur apparition… et depuis, du côté des dirigeants, qu’ils soient du côté de la mairie (propriétaire du  club via la SCIC Béziers sport) que du côté des présidents « officiels », on tente comme on peut d’écoper.
Taleta Tupuola et Hans Nkinsi sont deux joueurs phares de l’ASBH, deux titulaires indiscutables. C’est Nkinsi qui, en mai dernier, a fait chavirer tout le stade Raoul-Barrière, en parachevant l’action légendaire de la dernière chance, face à Brive. En plantant cet essai miraculeux, c’est lui qui envoya les Biterrois en demi-finales des Play-Offs de la Pro D2 sous la clameur d’un public en délire.
Désormais, c’est un autre rendez-vous qui l’attend avec la police. Il est en effet sous le coup d’une enquête pour violences conjugales. Si les faits sont reconnus, le joueur risque d’avoir du mal à invoquer la clémence du Tribunal, vu qu’il est en situation de récidive.
C’est pour les mêmes faits que, le 15 novembre prochain, Tupuola se présentera devant le tribunal de Béziers pour être jugé.
Cela fait beaucoup pour un seul club, deux joueurs incriminés, non ? eh bien ce n’est pas terminé. Un troisième s’est aussi fait « remarquer », c’est Samuel Marques. Lors de la Nuit du Rugby, alors qu’il venait d’être sacré meilleur joueur de la saison 2023-24 de Pro D2, en septembre dernier, le demi de mêlée portugais (21 sélections), déjà éméché, aurait souhaité, selon L’Équipe (du 25 octobre), se faire servir de l’alcool sur un stand qui n’avait que des jus de fruits et des sodas à offrir. Le joueur se serait alors énervé contre une jeune hôtesse et lui aurait jeté le contenu d’un verre au visage, n’hésitant pas à lui cracher dessus tout en lui manifestant fortement sa colère. L’hôtesse aurait ensuite informé son responsable sans porter plainte. La Ligue Nationale de Rugby (LNR), mise au courant de cette histoire, a décidé de s’en emparer et de ne rien laisser passer. Le n°9 de l’ASBH devra s’expliquer devant la commission de discipline de la LNR et de lourdes sanctions planent au-dessus de sa tête (le quotidien sportif parle de plusieurs semaines de suspension).
Dans le monde du rugby français, encore sous le choc de l’affaire Auradou-Jegou suspectés puis relaxés d’un viol en Argentine (à laquelle viennent se rajouter les propos « racistes » de Jaminet ou  le drame de Medhi Narjissi, emporté par les vagues en Afrique du Sud),  qui cherche à nettoyer les vestiaires de son sport comme Hercule dut s’employer à le faire pour les écuries d’Augias, ces histoires font « tache ». 

La "bêtise de gamin" a du mal à passer

Du côté du club biterrois, la réaction a été aussi vive que rapide. Les deux joueurs suspectés de violences conjugales ont été mis à pied. C’est ce qu’a déclaré Robert Ménard à Midi Libre. Pourquoi le maire a-t-il réagi au fait ? Simplement parce que, quand on parle de l’ASBH et qu’on essaie d’avoir une voix officielle pour le club, ce n’est bizarrement pas, comme dans tous les clubs, vers la présidence qu’on se tourne… mais vers la mairie. C’est ce qu’a fait Midi Libre, au moment d’enregistrer la réaction des dirigeants.
Si le maire se montre sévère avec les deux joueurs suspectés de violences conjugales – même s’il y a « présomption d’innocence », s’empresse-t-il de notifier -, il est plus magnanime envers Samuel Marques. Jeter le contenu d’un verre et cracher au visage d’une hôtesse s’assimile pour Robert Ménard, à « une bêtise de gamin » : « Il a craché de l’eau avec la bouche comme on le fait quand on a 15 ans (?) ! » On ne sait pas trop quel adolescent, et non gamin, de 15 ans, le maire de Béziers fréquente, mais on en connaît peu, à La Pieuvre, qui crache de l’eau au visage du premier venu. « Il s’est rendu compte de sa bêtise », poursuit-il. Faut-il se réjouir de cet éclair de lucidité ? Samuel Marques a 35 ans, pas 15. Les joueurs ne sont pas des enfants et il est inutile de les infantiliser. Ils sont capables d’assumer leurs responsabilités.
L’association « Les Simones Veillent » de Chantal Lapuerta, a eu du mal, en tout cas, avec cette qualification de « bêtise de gamin ». Elle l’exprime, via un communiqué : « (…) Cracher au visage d’une femme ne sont pas des « bêtises » mais bien un acte de violence physique, auquel s’ajoute un acte de violence psychologique visant à humilier la victime. »
Il reste que lors de la défaite de Béziers à Oyonnax (18-13), à la différence de Tupuola et Nkinsi, Marques était bien titulaire et a joué toute la rencontre.

On est tombés des nues 

Dire que l’ASBH a bien géré la crise est exagérée. Il semblerait qu’on ait plutôt navigué à vue. Quand on entend que les deux vrais (faux) coprésidents, Michaël Guedj et Hervé Billaud affirment qu’ils ont appris l’affaire sur le tard et disent en chœur (comme s’ils récitaient une belle partition) – « On est tombés des nues » – cela sonne terriblement faux. Interrogé par Rugbyrama, Michaël Guedj prend fait et cause pour les joueurs, s’inquiétant, « si les faits étaient avérés » de leur avenir. Pas un mot pour les victimes. Pour Marques, qu’il tient lui-aussi à différencier des deux autres « cas », il explique que le club a agi en interne pour le sanctionner… et espère que la sanction de la LNR ne sera pas trop « sévère ». Là aussi, la victime n’est pas évoquée. Pas un mot n’est prononcé sur elle, pas une excuse présentée. Même son de cloche pour l’autre coprésident, Hervé Billaud qui lui en plus, aurait aimé que ces affaires ne s’ébruitent pas afin de laver le « linge sale en famille ». On croit vraiment rêver.
On aimerait simplement rappeler que Nkinsi a déjà été condamné en avril 2023 pour violences conjugales par le Tribunal correctionnel d’Aix-en-Provence. Il est impossible que son employeur ignore ce fait. Alors quand les deux coprésidents affirment qu’ils tombent des nues, qu’ils le fassent croire à d’autres…
En tout cas, Chantal Lapuerta, elle, n’y croit pas une seconde : « Les violences faites aux femmes, au sein du club de rugby l’ASBH, pourraient être récurrentes, au point que dans l’année 2023, Les Simone Veillent ont déjà accompagné, une victime de violences intrafamiliales, dont l’auteur [ferait] partie de l’ASBH. Force est de constater que l’ASBH semble fermer les yeux sur ces violences, tant qu’elles ne sont pas rendues publiques, par voie de presse, alors que le club de rugby biterrois devrait, dans l’intérêt général, définitivement exclure ses membres condamnés pour violences conjugales (…). »
À l’heure où l’ASBH est en passe d’être vendue, tout cela fait mauvais genre. Mais bon, comme le dit Hervé Billaud, le rachat du club « est toujours en très bonne voie et suit son cours ». Tout va bien alors, hein ? Vivement qu’on en termine avec ces histoires de « gonzesses », et qu’on parle enfin des belles valeurs du rugby, qui n’est pas un sport de « gonzesses », hein, Billaud ? Ah, il est beau le monde de l’ovalie…  

PEA

►Dans un communiqué municipal en date du 30 octobre dernier, il est indiqué qu’une conférence de presse sur la reprise de l’ASBH se tiendra le 7 novembre à 16h au stade Raoul-Barrière.